En avril 2019, le Conseil d’Etat a créé une jurisprudence en établissant que les intérimaires doivent être intégrés à l’effectif d’une entreprise de travail temporaire, lui permettant ainsi, si son effectif total dépasse 11 salariés (tout en restant inférieur à 250) et que son chiffre d’affaires dépasse 2 millions d’euros (sans excéder 50 millions), de prétendre au statut de PME, et ainsi de profiter des avantages afférents. Inversement, si son effectif ainsi calculé dépasse 250 salariés, elle ne peut plus prétendre au statut de PME ! Décompte des intérimaires dans l’effectif pour obtenir la qualification de PME : retour sur une décision de justice qui change la donne.
Créance de CICE : préambule nécessaire
Avant de revenir sur la décision du Conseil d’Etat du 16 avril 2019 portant sur le décompte des effectifs des agences de travail temporaire, il convient de rappeler un point important concernant le Crédit d’Impôt pour la Compétitivité et l’Emploi (CICE).
Lorsque le montant de ce dernier est supérieur au montant de l’impôt dû par une entreprise, celle-ci doit attendre 2 à 3 ans pour obtenir de l’administration fiscale remboursement de cette créance… sauf si l’entreprise en question est qualifiée comme PME, auquel cas elle peut en demander le remboursement immédiat !
Quand on sait que le CICE représente 6% de la masse salariale inférieure à 2,5 SMIC, on comprend les enjeux que représente cette décision pour les entreprises de travail temporaire ! La qualification de PME permet d’améliorer considérablement la trésorerie… ou bouleverse le plan de trésorerie.
Quand une agence d’intérim lutte contre l’administration fiscale
Au départ de cette décision de justice qui change la donne en ouvrant de nouveaux horizons pour toutes les entreprises de travail temporaire, un différend entre une agence d’intérim et l’administration fiscale.
Après analyse du dossier, considérant que les intérimaires comptaient dans son effectif, l’administration fiscale demande à une entreprise de travail temporaire de rembourser la créance de CICE dont elle a bénéficié de manière anticipée. L’agence d’intérim conteste et fait alors appel de la décision de l’administration fiscale auprès de la Cour d’Appel de Paris.
Cette dernière va dans le sens de l’entreprise sur la base de cet argument : les intérimaires ne sont pas des salariés de l’agence mais sont destinés à être « placés » dans des entreprises clientes. Ils ne peuvent dès lors être décomptés des effectifs ; il n’y aurait donc pas lieu de qualifier l’agence d’intérim en PME.
C’est alors le Ministre de l’Action et des Comptes Publics qui intervient en déposant un pourvoi contre cette décision. Finalement, le Conseil d’Etat casse la décision de la Cour d’Appel en rappelant que si les intérimaires sont destinés à être employés par les clients de l’agence d’intérim, ils sont cependant liés à l’entreprise de travail temporaire par un contrat de mission, ce qui impose de les comptabiliser dans l’effectif. De ce fait, les effectifs de l’agence d’intérim dépassaient les 250 salariés, la privant de la possibilité d’obtenir un remboursement immédiat des créances de CICE !
Aurélien Desert, Franchise Intérim ©